Geamăna est un projet d’activisme poétique qui englobe trois chapitrés : INVERSER L´ENTROPIE, OPHELIA AND THE ANTHROPOCENE - BINECUVÂNTARE et LE MONDE PERDU.

En 2017, j’ai  découvert l’existence de Geamăna, un village roumain englouti sous l’eau toxique et multicolore d’un bassin de décantation. À la fin des années 1970, le régime de Nicolae Ceaușescu a sacrifié ce village situé au pied de montagnes Roșia Poieni au profit de l’exploitation des mines de cuivre, contraignant 365 familles à partir. Aujourd’hui, l’extraction de cuivre et autres métaux dans les montagnes éventrées de Roșia Poieni est en train de provoquer une catastrophe écologique sur plus de 130 hectares, avec plus de 27 millions de tonnes de déchets déposés dans le bassin par an. La pollution toxique risque de se propager jusqu’au Danube et, de ce fait au-delà des frontières roumaines. Le paysage, recouvert et transformé par de multiples couches de déchets, de cyanure, de minerais, de chaux, etc. pose des questions sur les relations complexes entre politique, économie, morale, écologie, esthétique, spiritualité… et le rôle de l’artiste.

Si la Roumanie est un pays démocratique depuis 1989, il est toujours interdit de visiter ou de photographier le site de Geamăna. Il semblerait que le régime actuel agisse dans la continuité de l’ancien système totalitaire sous lequel l’extraction a commencé il y a une quarantaine d’années.

Geamăna pose la question du sublime. Si, par le passé, on associait le sublime à l’homme submergé par la tempête, défié par les forces de la nature, aujourd’hui l’homme est devenu le témoin de ses propres désastres, à la fois terrifiants et « sublimes ». Seule trace de la présence de l’ancien village de Geamăna, le toit de l’église, symbole du sacré, émerge des eaux dont la couleur est provoquée par la présence de cyanure. Tel un « vestige du futur », le toit de l’église met en garde. Malgré le destin tragique de leur village, les riverains n’ont jamais cessé de croire en Dieu et en la spiritualité.